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Avances de fonds par terminaux de paiement : Une solution miracle ou un piège coûteux pour votre entreprise? 

Par Sara-Jane Breault
Conseillère aux entreprises - Entrepreneuriat et accompagnement stratégique

Vous êtes entrepreneur et vous cherchez rapidement des liquidités pour votre entreprise? Votre terminal de paiement Square, Fiserv ou Stripe vous propose une « avance de fonds » alléchante, disponible en 24-48 heures? Attention! Cette solution apparemment miracle pourrait vous coûter beaucoup plus cher que prévu.

Pas envie de lire? Écoutez l’entrevue faite par François Desmarais, directeur du développement économique à la MRC de Coaticook sur le sujet à Radio-Canada Estrie 

Qu'est-ce qu'une avance de fonds par terminal de paiement?

Une avance de fonds sur ventes par carte (aussi appelée Merchant Cash Advance ou MCA) est un produit financier où une entreprise reçoit une somme d'argent immédiatement en échange d'un pourcentage de ses ventes futures par carte de crédit ou débit, le tout, via son fournisseur de service de traitement de paiement par carte. 

Comment ça fonctionne concrètement? 

Exemple simple : 

  • Vous recevez 20 000 $ aujourd'hui 
  • Vous acceptez de rembourser 26 000 $ (facteur 1,3) 
  • Le fournisseur prélève automatiquement 10% de vos ventes quotidiennes jusqu'au remboursement complet 
  • Pas d'échéance fixe : tout dépend de vos ventes 

Les avantages qui attirent les entrepreneurs 

Rapidité d'accès 
L'approbation se fait souvent en 24-48 heures, contrairement aux prêts bancaires traditionnels qui peuvent prendre des semaines. 

Simplicité administrative 
Pas de garantie personnelle exigée, processus simplifié, et parfois aucune vérification de crédit traditionnelle. 

Remboursement flexible 
Les prélèvements s'ajustent à vos ventes : moins de ventes = remboursement plus lent, plus de ventes = remboursement plus rapide. 

Les risques cachés des avances de fonds sur ventes par carte : ce qu'on ne vous dit pas 

Le piège du "facteur multiplicateur" : un coût réel astronomique 
Quand on vous dit "facteur 1,2", cela ne signifie PAS 20% d'intérêt annuel! En réalité, selon la vitesse de remboursement, cela peut représenter entre 30% et 100% de taux d'intérêt annualisés, voire plus. 

Exemple chiffré : 

  • Avance de 10 000 $ avec facteur 1,2 = remboursement de 12 000 $ 
  • Si remboursé en 3 mois : équivalent à 146% d'intérêt annuel 
  • Si remboursé en 12 mois : équivalent à 24% d'intérêt annuel 

Même si 24% est beaucoup moins que 146%, ça reste beaucoup plus élevé que les marges de crédit commerciales ou qu’un prêt traditionnel. 

Pression quotidienne sur la trésorerie 
Contrairement à un prêt avec des versements mensuels, les MCA prélèvent un pourcentage tous les jours sur vos ventes. Si vos marges sont serrées, cela peut créer une pression constante sur votre trésorerie. 

Manque de transparence inquiétant 

Les fournisseurs de MCA ne sont pas tenus de divulguer : 

  • Un taux d'intérêt annuel standardisé (TAEG) 
  • Une durée de remboursement précise 
  • Des frais normalisés comparables aux prêts bancaires 

Cette opacité rend les comparaisons difficiles et peut masquer le coût réel. 

Pourquoi ce n'est pas considéré comme un prêt

Légalement, les MCA sont considérés comme un "achat anticipé de créances futures" plutôt qu'un prêt. Cette distinction permet d'éviter : 

  • Les lois sur la protection du consommateur 
  • Les règles sur les taux d'intérêt maximaux 
  • L'obligation de divulgation standardisée 

Ainsi, même si le Bureau de la concurrence a reçu quelques plaintes sur les MCA, la surveillance est limitée et les recours difficiles.  

Impact sur les entreprises

Bien qu'aucune statistique officielle ne soit disponible au Canada, les observations d'experts sont préoccupantes : 

  • Les MCA sont parmi les principales causes de pression de trésorerie chronique chez les PME 
  • Phénomène de "stacking" : contracter plusieurs MCA successivement pour rembourser la précédente, ce qui augmente les enjeux de liquidités à terme.  
  • Présence fréquente dans les dossiers de faillite ou de réorganisation 

Avant de signer : les questions essentielles 

Calculez le coût réel 
Questions à poser absolument : 

  • Quel est le montant total à rembourser ? 
  • Quelle est la durée estimée de remboursement ? 
  • Quel est l'équivalent en taux d'intérêt annuel ? 

 Explorez les alternatives
Options à considérer avant une MCA : 

  • Marge de crédit commerciale 
  • Prêts traditionnels auprès d’une banque 
  • Financement par factures (affacturage) 
  • Prêts participatifs ou subventions sectorielles 

Vérifiez les clauses contractuelles 

  • Êtes-vous lié à un terminal de paiement spécifique? 
  • Y a-t-il des garanties personnelles cachées? 
  • Quelles sont les conséquences en cas de difficultés de remboursement?  

Nos recommandations d'experts

Évitez les MCA si : 

  • Vous cherchez un financement à long terme 
  • Vos marges sont serrées 
  • Vous ne comprenez pas clairement les modalités 
  • Vous n’avez pas évalué d’autres options de financement avant 

Conclusion : La prudence avant tout

Les avances de fonds par terminaux de paiement peuvent dépanner à court terme, mais elles représentent l'une des formes de financement les plus coûteuses disponibles. Leur manque de transparence et leur coût réel souvent masqué en font un produit risqué pour de nombreuses PME, qui peut aggraver une situation financière déjà précaire. 

Notre conseil : Consultez toujours un conseiller ou un comptable avant de signer. Il existe souvent des alternatives moins coûteuses et plus transparentes pour répondre à vos besoins de financement. 

 

Besoin d'aide pour évaluer vos options de financement? Notre équipe de conseillers aux entreprises peut vous accompagner dans cette démarche, sans frais et sans pression. Nous pouvons aussi vous aider à faire le point sur votre stratégie et vous accompagner dans la gestion dans la mise en place d’un plan pour améliorer la gestion de vos liquidités. Contactez-nous!  

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